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La mode, une industrie très polluante

La mode, une industrie très polluante

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100 milliards de vêtements sont produits chaque année dans le monde. Pourtant, de leurs lieux de confection jusqu’à nos placards, nos pantalons et tee-shirts polluent notre planète.
iStock.com/Lilechka75

Spoiler alert : la mode est l’une des industries les plus polluantes au monde. Sans vous assommer de chiffres déprimants, rappelons quand même que l’industrie textile émet 1,2 milliards de tonnes de gaz à effet de serre chaque année, soit davantage que le transport maritime et aérien international réunis. Prenons l’exemple du jeans, l’emblème de nos placards : du champ à la boutique, un jeans peut parcourir jusqu’à 1,5 fois le tour de la Terre (65 000 km). L'Agence de la Transition Energétique (Ademe) rappelle que pour le fabriquer, on utilise souvent "du coton cultivé en Inde ou en Afrique qui sera ensuite teint dans un autre pays puis renvoyé en Asie pour la confection afin d’être finalement vendu en France et partout dans le monde".

Des matières premières polluantes 

Car si le transport est l’un des fléaux de l’industrie textile, ce n’est peut-être pas le pire. Les matières premières utilisées pour fabriquer nos vêtements participent grandement au problème. "La production des matières premières représente 15% de la contribution du produit au réchauffement climatique, 30% de sa contribution à la dégradation des écosystèmes, 18% de son impact sur les ressources, et 31% de sa consommation d’eau", peut-on lire dans l'étude Mode responsable : le guide pour agir de Deloitte Développement Durable.

Celles-ci ne sont pas anodines : le polyester, par exemple, la matière la plus utilisée aujourd'hui dans le prêt-à-porter, est une fibre synthétique produite à partir de pétrole. Quant à la viscose, sa fabrication demande d'utiliser des produits chimiques toxiques. L'élevage, nécessaire à la confection de laine et de cuir, est aussi un gros pourvoyeurs de gaz à effet de serre.

La culture du coton n'est pas plus exemplaire. On ne s’en rend pas forcément compte lorsque qu’on achète un énième tee-shirt en coton, mais pour le fabriquer, il faut l’équivalent de 70 douches. Oui, vous avez bien lu, 70 douches ! La culture du coton est en effet très gourmande en eau, tout comme en pesticides, d'ailleurs. Le textile est en fait le 3ème secteur consommateur d’eau dans le monde. 4% de l’eau potable disponible est utilisée pour produire nos vêtements. 

Un champs de coton
Photo by fred moreno on Unsplash

La production des matières premières représente 15% de la contribution du produit au réchauffement climatique, 30% de sa contribution à la dégradation des écosystèmes, 18% de son impact sur les ressources, et 31% de sa consommation d’eau.

Eaux polluées 

D’un côté il y a la consommation d’eau, de l’autre il y a la pollution, car de nombreux pays ne bénéficient pas d’infrastructures de traitements des eaux utilisées pour la fabrication de nos vêtements. Selon l’enquête “Dirty Laundry” (linge sale, en français) menée en 2011 par Greenpeace, 70% des eaux des rivières et lacs en Chine sont polluées, notamment à cause de l’industrie textile. Les usines rejettent entre autres des teintures, qui contiennent des substances chimiques et sont donc polluantes pour l’environnement et dangereuses pour la santé.

Dans son étude Les Dessous toxiques de la Mode, l'ONG s'est penchée en 2012 sur 20 marques (dont Zara, Nike, Levi’s, ou encore C&A). L'enquête a révélé la présence de produits toxiques polluants dans les vêtements, comme les phtalates, toxiques "pour les êtres humains et les animaux" et les éthoxylates de nonylphénol, aussi appelés dérivés éthoxylés du nonylphénol (NPE). "Une fois dispersés dans les installations de traitement des eaux usées, ou directement dans l’environnement, les NPE se dégradent en nonylphénol (NP)", précise le rapport. Ce dernier est un composé persistant, "toxique, agissant comme un perturbateur endocrinien".

Dans un article de Marie-Claire, la journaliste Mélody Thomas rappelle qu'à Xintang, ville de la Province Guandong en Chine, "souvent perçue comme étant la capitale mondiale du jean", 3000 usines et ateliers "produisent 300 millions de paires par an soit 800 000 par jour", et cite le livre Fashionopolis, le vrai prix de la mode et ce qui peut la sauver, de la journaliste américaine Dana Thomas :

"L'usine locale de traitement des eaux a fermé ses portes il y a des années, laissant les usines déverser les déchets de teinture directement dans l'East River, un affluent de la Pearl River. Elle est devenue opaque ; la vie aquatique ne pouvait plus survivre. Greenpeace a rapporté que le lit de la rivière contient des niveaux élevés de le plomb, le cuivre et le cadmium. Les rues de Xintang sont bleues et de nombreux travailleurs auraient souffert d'éruptions cutanées, d'infertilité et d'infections pulmonaires".   

Régulièrement, lors de ses conférences, Orsola de Castro, co-fondatrice du mouvement Fashion Revolution, déplore d’ailleurs qu’on puisse "prédire la prochaine couleur à la mode en regardant celle des rivières en Chine".

Gaspillage 

En Europe, on se débarrasse chaque année de 4 millions de tonnes de textiles, "dont 80% sont jetés dans la poubelle pour les ordures ménagères et finissent par être tout simplement enfouis ou incinérés", selon l’Ademe

100 milliards de vêtements sont produits chaque année dans le monde.

Les vêtements teints, enfouis, peuvent contaminer les sols et avoir un impact catastrophique sur les nappes phréatiques (et donc sur la planète). "Beaucoup de vêtements jetés échouent dans les décharges indiennes ou chinoises, où ils mettront, pour les fibres synthétiques, plus de 200 ans à se dégrader, en dégageant des gaz toxiques. Et nul n’ignore les dégâts que les produits chimiques utilisés dans la fabrication des textiles infligent à la nature", peut-on lire sur Slate.fr. D'après les données de Greenpeace, la production de vêtements a doublé dans le monde entre 2000 et 2014. Cette année là, pour la première fois, "le nombre de vêtements produits a dépassé 100 milliards". Une étude du Parlement européen explique qu'en 2015, les Européens ont acheté 6,4 millions de tonnes de nouveaux habits et chaussures... Soit 12,66 kg par personne. Or, ces vêtements sont parfois portés une dizaine de fois, pas plus.

Des tee-shirts sur un portant
Photo by Parker Burchfield on Unsplash

Pourtant, si on multipliait par deux la durée d’usage d’un vêtement (en lui donnant une seconde vie par exemple), les émissions de gaz à effet de serre seraient réduites de 44 % selon la Fondation Ellen McArthur. "Porter un vêtement trois mois de plus réduit de 10% son empreinte carbone, soit son impact sur le dérèglement climatique", rappelle également Majdouline Sbai dans son livre Toujours moins cher mais à quel prix ? Huit solutions pour une mode éthique. Mais la fast fashion compte sur les consommatrices et les consommateurs pour acheter toujours plus de vêtements, en sortant des nouvelles collections pratiquement toutes les semaines. Ce rythme effréné entraîne des conséquences dramatiques pour notre planète. 

Porter un vêtement trois mois de plus réduit de 10% son empreinte carbone, soit son impact sur le dérèglement climatique.

Le problème des machines 

On comprend mieux pourquoi la mode pollue. Pourtant, les transports, les matières premières, l’utilisation de ressources naturelles et les teintures ne sont pas les seules causes de la pollution engendrée par l’industrie textile. "Les émissions de gaz à effet de serre du textile viennent en grande partie de quelque chose que vous ne voyez jamais : l’énergie consommée par les machines qui transforment la matière première en vêtements », rappelle la marque engagée Loom. Toutes ces machines consomment beaucoup d’électricité. Sauf qu’en Asie, l’électricité est produite par des centrales à charbon ou à gaz, des énergies fossiles extrêmement polluantes. Donc, plus on produit de vêtements, plus on pollue. 

Vous l’aurez compris, la mode est loin d’être l’industrie glamour qu’on veut bien nous montrer. Mais des solutions existent. Nous vous expliquons d’ailleurs comment reconnaître les marques éco-responsables qui tentent de diminuer leur impact sur la planète.

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À propos de l'autrice
Chloé Cohen
Journaliste engagée
Chloé Cohen est journaliste et créatrice du podcast Nouveau Modèle sur la mode responsable. Après 3 années passées à New York comme correspondante, Chloé s’est spécialisée dans les problématiques environnementales et sociales de l’industrie textile.
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